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Pratique médicale ayant connu un fort développement durant la crise sanitaire, la téléconsultation est désormais pleinement intégrée dans les usages de la médecine et son recours pour les patients en est facilité. Pour autant, les avancées technologiques et les réglementations en matière de sécurité amènent de nombreuses questions sur son utilisation pérenne et sur les défis futurs pour les acteurs de santé. Finalement, la téléconsultation sera-t-elle l’avenir de la consultation médicale ? Échange avec le Dr Pierre Simon, Médecin néphrologue, juriste et ancien président de la Société française de télémédecine.
La télémédecine, qui comprend la téléexpertise, la téléconsultation, la télésurveillance, la téléassistance et la régulation médicale du centre 15, est une pratique médicale effectuée par un médecin à distance en mobilisant des technologies de l'information et de la communication. Elle est réservée aux seuls professionnels médicaux qui font des actes à distance.
De fait, la téléconsultation consiste en une consultation réalisée à distance d’un patient par un médecin (généraliste ou de toute autre spécialité médicale), le patient pouvant être assisté ou non, à cette occasion, par un autre professionnel de santé (ex : médecin, infirmier, pharmacien…).
La téléexpertise, quant à elle, est une pratique qui permet à un médecin de solliciter d’un autre médecin son expertise en raison de sa formation ou de sa compétence particulière. Dans ce cadre, on distingue un requérant et un requis (celui qui est l’expert). Jusqu’au 3 juin 2021, le recours à la téléexpertise n’était possible qu’entre professionnels médicaux afin de réduire les délais de prise en charge et assurer la continuité des soins. Depuis le 3 juin, et la publication du décret relatif à la télésanté, les auxiliaires médicaux et les pharmaciens peuvent désormais être également des requérants. Cette téléexpertise ne peut cependant se faire que vers des professionnels médicaux. Il n’est, à ce jour, pas possible pour un pharmacien de faire de la téléexpertise avec un autre pharmacien. Il en est de même entres infirmiers et entre masseurs-kinésithérapeutes.
Cette ouverture de la téléexpertise aux pharmaciens a été une demande forte de la part de la profession. En effet, les pharmaciens d’officine estimaient qu’ils étaient experts dans le bon usage du médicament et qu’ils dépistaient ainsi plus facilement les intolérances aux médicaments. Avec la téléexpertise, le pharmacien peut désormais, directement et immédiatement, entrer en contact avec le médecin traitant et donner l’information de l’intolérance du patient à un médicament particulier. Dans la même continuité, la notion de pharmacien correspondant d’un patient a récemment été mise en place.
Le télésoin, pour sa part, concerne les pharmaciens et les 17 professions d’auxiliaires médicaux et permet, grâce à l’utilisation de la vidéo transmission, de suivre un patient à distance. Ils réalisent de fait une activité de télésoin.
Qu’il s’agisse de la téléconsultation ou du télésoin, il n’y a pas de limites données sauf si le professionnel de santé estime avoir besoin de voir le patient en présentiel. « Il est important de retenir que les professionnels de santé qui désirent faire des soins à distance ont la responsabilité de la pertinence des actes ». La Haute Autorité de Santé (HAS) conseille ainsi de voir la personne en présentielle pour bien la connaître et savoir si elle est capable d’avoir des soins à distance.
Le décret publié le 3 juin 2021 et relatif à la télésanté éclaire aujourd’hui un peu plus l’utilisation de la téléconsultation. Il reprécise ainsi les conditions de mises en œuvre d’une action de soin dans la santé et revoit l’ensemble des pratiques de télésanté, celle-ci étant la télémédecine (téléconsultation médicale fait par les médecins, sages-femmes et chirurgiens-dentistes, la télésurveillance, la téléassistance et la régulation médicale) et le télésoin. Ce décret a inséré, par ailleurs, dans l’article R7316-2 du Code de la Santé publique, un nouvel article mettant en avant la notion de pertinence d’un acte de télémédecine ou de télésoin. De nombreuses téléconsultations ayant eu lieu durant la pandémie n’étant pas vraiment pertinentes (ex : la téléconsultation par téléphone).
Obligation réglementaire, une téléconsultation doit ainsi aujourd’hui être réalisée en fonction d’un besoin pertinent. La HAS a, par ailleurs, précisé ce qu’était la pertinence d’un acte de téléconsultation. De fait, plusieurs facteurs doivent être vérifiés par le médecin avant d’initier une téléconsultation tels que le motif de la demande ou encore la capacité de la personne à s’adapter à un outil numérique (parler à travers un écran, la langue). Il y a donc à la fois des facteurs humains et des facteurs technologiques.
De même, pour juger de la pertinence de la téléconsultation, il est nécessaire que le médecin connaisse le patient. Si la demande de téléconsultation par un patient se fait via une plateforme de téléconsultation, le médecin, qu’il soit généraliste ou spécialiste (ophtalmologue, gynécologue, psychiatre, pédiatre ou odontologue), devra estimer la pertinence de la demande et si ce n’est pas le cas, le médecin a l’obligation d’interrompre la consultation à distance. Pour se faire, les médecins ont la possibilité de mettre des créneaux de téléconsultation et d’accepter uniquement les patients qu’ils connaissent déjà ou d’ouvrir ces plages de téléconsultation à des nouveaux patients. Dans ce dernier cas, le médecin devra évaluer la pertinence de la demande dans les premières minutes de la consultation à distance. Si un examen physique est nécessaire, le médecin doit alors interrompre la téléconsultation et proposer une visite en présentielle. Pour que ce soit pertinent, il faut parfois qu’il y ait un examen physique. Cela permet notamment de faire une première orientation sur le besoin du patient et un tri des patients.
Notre système de santé est à deux niveaux de recours : médecin traitant et médecins spécialistes hors parcours de soin. En France, un patient ne peut pas consulter un médecin spécialiste tel qu’un dermatologue par exemple sans passer par le médecin traitant. Seules 5 spécialités peuvent être consultées directement sans passer par le médecin traitant : ophtalmologie, gynécologie, psychiatrie, pédiatrie ou odontologie. En effet, il y a une volonté de respecter le parcours de soin. De fait, les médecins généralistes et les médecins spécialistes qui font partie du parcours de soin utilisent la téléexpertise entre eux.
Pour les 5 médecines de spécialité pouvant être consultées directement par le patient, la téléconsultation permet d’apporter un avis rapide et immédiat au patient. Ainsi, dans le cadre des téléconsultations de gynécologie, la téléconsultation est souvent utilisée pour un oubli de pilule ou son renouvellement.
Les téléconsultations pour la psychiatrie concernent particulièrement les expatriés qui ressentent le besoin d’avoir un soutien psychologique. Pour la pédiatrie, la téléconsultation permet la mise en place de permanences de soin de pédiatre qui donnent un avis immédiat aux parents sur une problématique qui ne nécessite pas d’examen physique. Un nourrisson qui a de la fièvre par contre doit toujours avoir un examen physique et le pédiatre téléconsultant organisera la consultation présentielle.
Avant la pandémie, 60 000 téléconsultations étaient réalisées par an. En avril 2020, le nombre de téléconsultations est passé à 4,5 millions et a atteint près de 20 millions à la fin décembre 2020.
Aujourd’hui, il ressort que 25 % du corps médical continue de faire de la téléconsultation. Un prochain avenant de l’Assurance Maladie doit d’ailleurs être bientôt signé, lequel introduira une limite de téléconsultation aux médecins. Ainsi, seul 20 % de l’activité médicale sera attribué à la téléconsultation. Pour autant, même avec cette limitation, le nombre de téléconsultations par an devrait être toujours aussi important : de l’ordre de 8 millions de téléconsultations par an. La téléconsultation connaîtra peut-être ainsi encore une montée en puissance dans les années suivantes, si elle atteint les 20 % d’une activité totale de consultation médicale en France, proche de 350 millions/an.
Avant la pandémie, moins de 2 % de la population française avait recours à la téléconsultation. Avec la crise sanitaire, on estime que 30 % de la population a expérimenté une téléconsultation. Tous les sondages, réalisés par la suite pour savoir comment les Français avaient accepté la téléconsultation, ont mis en exergue qu’environ 8 Français sur 10 ont trouvé la téléconsultation satisfaisante. Il ressort également que la téléconsultation est davantage utilisée par les jeunes et travailleurs mobiles que par les personnes âgées.
De même, il y a des médecins qui ont découvert la téléconsultation avec la pandémie et qui y ont trouvé un avantage dans leur activité. Ces derniers vont continuer à utiliser cette pratique médicale quand d’autres médecins estiment qu’il s’agit d’une dégradation de l’acte médical.
Dans l’avenir, les solutions de téléconsultation s’installeront dans le parcours de soins des patients via la plateforme de l’Espace du Numérique en Santé mise en place par l’État. Avec cet espace, c’est le médecin qui décidera de faire ou non de la téléconsultation et le patient consentira ou non à cette forme de consultation. En effet, en proposant des consultations à distance, le médecin engage sa responsabilité et doit donc pouvoir définir la pertinence de l’acte.
Pour autant, pour démocratiser la téléconsultation, il sera nécessaire dans un premier temps de corriger les zones blanches existantes en France, car la téléconsultation nécessite une bonne connexion Internet. Aujourd’hui, en France, on estime que 6 à 7 millions de Français ne peuvent pas faire de téléconsultation depuis leur domicile. C’est la raison pour laquelle, en septembre 2019, les pharmaciens ont été autorisés à s’équiper pour organiser des téléconsultations à la demande des médecins et des Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS : regroupement des professionnels de santé autour d’une association ayant en charge de résoudre les problèmes d’accès au soins), les pharmacies étant généralement le dernier « ilot de santé » dans les villages et petites communes qui n’ont plus de médecins généralistes.
De même, pour démocratiser l’accès, il est aussi nécessaire d’avoir des organisations qui puissent bénéficier aux patients dans les déserts médicaux. Le recours à des médecins salariés de centres de santé créés par les collectivités territoriales peut être une solution à envisager.
Plusieurs défis attendent les plateformes de service de téléconsultation à l’avenir.
Tout d’abord, il est important que chaque solution utilisée par les professionnels de santé soit sécurisée, fiable et agile. Parmi, toutes les offres qui ont été faites durant le premier confinement, seule la moitié était acceptable sur ce point. Pour les pérenniser, il faut donc que les industriels proposent des solutions fiables, agiles et sécurisées en matière de données de santé. Environ la moitié des téléconsultations se sont faites avec WhatsApp et Skype durant la Covid. Ce ne sont pas des plateformes sécurisées. Il faut donc qu’on arrive en France à avoir un système WhatsApp de santé aussi agile mais sécurisé. C’est le cas de CompuGroup Medical qui propose grâce à sa plateforme CLICKDOC PRO un service respectant ces obligations.
De même, avec la mise en place de l’Espace Numérique en Santé (ENS), l’État proposera des messageries sécurisées permettant des échanges entre le professionnel de santé et son patient et un store comprenant les solutions numériques qui auront été choisies par les autorités sanitaires et garantiront pleinement la fiabilité et l’agilité. C’est dans ce store que les professionnels de santé choisiront leur future plateforme de téléconsultation. Ainsi, pour accéder au « store » de l’ENS, les services de téléconsultation vont devoir présenter leur produit devant un jury et l’État choisira les plateformes de téléconsultation qu’il veut mettre dans son store et qui seront donc pérennes pour les professionnels de santé.
Le second défi pour les services de téléconsultation est l’interopérabilité des plateformes avec tous les logiciels métiers des professionnels de santé et les solutions qui apparaîtront avec l’intelligence artificielle. Les industriels ont ainsi comme challenge de travailler cette interopérabilité notamment avec la plateforme numérique de santé de l’État (messagerie sécurisée, DMP, les algorithmes d’IA).
Concernant les professionnels médicaux, le principal défi est de respecter la réglementation RGPD et la sécurité des données de santé. Alors que les médecins salariés des hôpitaux sont aidés par les directions du système d’information (DSI), les médecins libéraux doivent, quant à eux, se former eux-mêmes. Or, le médecin n’a pas la compétence informatique. Il doit donc être aidé pour respecter ces réglementations. Selon moi, il serait intéressant que l’assurance maladie leur donne des financements pour se payer des accompagnements avec des personnes expertes dans le domaine de la fiabilité des logiciels et du RGPD. Ils ont besoin d’être accompagnés pour sécuriser leurs outils numériques : financièrement et en compétences techniques.
Le recours à la téléconsultation dans l’avenir se fera surtout lorsque l’on n’a pas une maladie grave ou chronique. Ainsi, les consultations médicales à distance seront pour les rhumes et les petits bobos.
En revanche, lorsque le patient est véritablement malade et souffre notamment d’une maladie chronique, il alternera entre présentiel et téléconsultation. Je ne crois pas à la substitution totale des consultations en présentielles par la téléconsultation.
Enfin, les personnes qui pensent à l’avenir font 2 constats :